Alain Hervéou travaille d'une façon singulière. Il réalise de grands tirages à partir de Polaroïd où il met en scène, à chaque fois, sa propre image minuscule au milieu d'un univers d'objets et d'éléments du quotidien. Le voici, tout petit et nu, sur le coin de la cheminée, au milieu des souvenirs de familles, errant sur la table entre les livres géants, toujours émergeant dans un espace voué à la mémoire, trop grand, trop labyrinthe pour sa silhouette fragile et nue.

En jouant sur les échelles, ces autoportraits émouvants nous parlent de la place éphémère de l'homme dans l'ordre des choses. C'est une œuvre intimiste, qui joue sur les patines et les craquelures, les voiles et les pénombres, une œuvre sentimentale et profonde, plus proche de Proust que des images chic et choc de notre culture-pub. En un mot, une œuvre de l'esprit, silencieuse, dans laquelle on pénètre avec nos bagages personnels tant ces réminiscences chuchotées sont partagées.

On y parle du temps, de la connaissance, de l'art, du hasard, de la solitude et de la mort, et de la recherche de l'identité de l'être en contredisant fortement les cartésiens : l'espace mental de l'homme n'est pas un cube transparent…

Martine Gayot