Photographe plasticien, Alain Hervéou évoque notre rapport au monde actuel, au quotidien en tant qu'individus. L'utilisation du médium photographique est plus qu'un témoignage .

Il tente de piéger le temps puis de fixer et d'orienter ses mouvements. Mais le temps du regard, la mémoire de l'instant présent ne sont plus possibles . Dans "Privilèges de l'éphémère" les personnages en couleur avancent mais ne voient pas leur entourage. Et notre regard est pris dans ce mouvement, il s'abîme au fond du décor.
Puis une réelle prise de conscience du présent s'établit dans le travail d'Alain Hervéou, il ne se place plus dans le mouvement; mais au contraire, dans l'instant, le moment où le sensible et la réflexion se posent et justifient l'ambivalence de l'être : l'essence et l'apparence, dualité dans notre société où le matérialisme prédomine.

"Photoanthropographie" se définit à travers l'autoportrait sous forme "d'objets" où les cadres et certains reliefs soulignent cette ambivalence.

Au fil des planches, une constante s'installe, la représentation noir et blanc d'un nu nous montrant l'invariabilité de l'essence de l'être.

A ce personnage est confronté le symbole des apparences; la représentation Polaroïd des choses liées au phénoménal et à l'éphémère .

L'individu s'inscrit au sein d'une société avec ses stéréotypes, ses mouvements et ses apparences. Mais de par la connaissance, il évolue et s'élève. L'être est lié invariablement à la matière et à l'expérience.

Alain Hervéou se pose maintenant plus comme critique du monde nihiliste et individualiste. L'homme y a perdu la problématique de l'être. Il fait abstraction de la matière et de ses propres obsessions.

Ce travail est une recherche de soi, une prise de conscience de l'être où la photographie prend toute sa force dans la mesure où elle est temps, représentation, mémoire et ambiguïté entre ce qui est et ce qui n'est pas ou plus.

Pascale Davy